C'est le 2nd roman de Sorj Chalandon, il a été publié en 2006 et a obtenu cette année-là le prix Médicis. Après la lecture de deux romans plus récents, Le Quatrième Mur (2013) et Profession du père (2015), j'ai eu l'impression de ne pas reconnaitre l'auteur ! l'écriture comme le sujet m'ont semblé complètement différents. Je ne m'attendais pas à ces personnages d'un milieu populaire mayennais, je ne ne m'attendais pas non plus à toute cette délicatesse d'écriture et à cette poésie qui fait la spécificité de ce roman, je m'étais habituée au narrateur-personnage.
La surprise passée, j'ai poursuivi la lecture, touchée par l'amitié sans faux-semblant qui unit les personnages, par l'humanité qui se dégage de chaque portrait de personnage, par l'extrême délicatesse de l'écriture... mais aussi dérangée par le sujet : tout le livre concerne un deuil! Sans doute suis-je dans une période de la vie où un tel sujet pèse particulièrement.
Extrait qui me parait représentatif (p.174/175) :
"_ Voilà, c'est mon histoire. Elle n'est pas comme les vôtres, il lui manque un milieu et une fin, mais c'est la seule que j'ai.
_C'est bien que tu l'aies racontée, dit Madeleine.
_ Bien ou pas, je m'en fous complètement, lui répond Berthevin.
_Il s'en fout ? Tu crois ? demande Fauvette.
Étienne a les yeux fermés, comme quand la mort vous gagne.
_ Il est bouleversé, répond son mari.
_Tu crois que les autres le savent ?
_ Qu'est-ce que nous savons les uns des autres ?
Elle regarde son vieil homme. Elle sourit. Ils entendent l vie qui murmure dans la pièce du bas."