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8 novembre 2009 7 08 /11 /novembre /2009 20:11
Voici un choix de quelques poèmes écrits en prose par Francis Ponge et publiés dans le recueil au titre éloquent Le Parti Pris des choses  (1942) : ils conjuguent avec une grande virtuosité poésie, sensations et émotions.

 

Le Pain

La surface du pain est merveilleuse d’abord à cause de cette impression quasi panoramique qu’elle donne : comme si l’on avait à sa disposition sous la main les Alpes, le Taurus ou la Cordillère des Andes.

 

Ainsi donc une masse amorphe en train d’éructer fut glissée pour nous dans le four stellaire, où durcissant elle s’est façonnée en vallées, crêtes, ondulations, crevasses… Et tous ces plans dès lors si nettement articulés, ces dalles minces où la lumière avec application couche ses feux, - sans un regard pour la mollesse ignoble sous-jacente.

 

Ce lâche et froid sous-sol que l’on nomme la mie a son tissu pareil à celui des éponges : feuilles ou fleurs y sont comme des sœurs siamoises soudées par tous les coudes à la fois. Lorsque le pain rassit ces fleurs fanent et se rétrécissent : elles se détachent alors les unes des autres, et la masse en devient friable…

 

Mais brisons-la : car le pain doit être dans notre bouche moins objet de respect que de consommation.


L'Huître

 

L'huître, de la grosseur d'un galet moyen, est d'une apparence plus rugueuse, d'une couleur moins unie, brillamment blanchâtre. C'est un monde opiniâtrement clos. Pourtant on peut l'ouvrir : il faut alors la tenir au creux d'un torchon, se servir d'un couteau ébréché et peu franc, s'y reprendre à plusieurs fois. Les doigts curieux s'y coupent, s'y cassent les ongles : c'est un travail grossier. Les coups qu'on lui porte marquent son enveloppe de ronds blancs, d'une sorte de halos.

 

À l'intérieur l'on trouve tout un monde, à boire et à manger : sous un firmament (à proprement parler) de nacre, les cieux d'en-dessus s'affaissent sur les cieux d'en-dessous, pour ne plus former qu'une mare, un sachet visqueux et verdâtre, qui flue et reflue à l'odeur et à la vue, frangé d'une dentelle noirâtre sur les bords.

Parfois très rare une formule perle à leur gosier de nacre, d'où l'on trouve aussitôt à s'orner.



L'Orange

 

Comme dans l’éponge il y a dans l’orange une aspiration à reprendre contenance après avoir subi l’épreuve de l’expression. Mais où l’éponge réussit toujours, l’orange jamais : car ses cellules ont éclaté, ses tissus se sont déchirés. Tandis que l’écorce seule se rétablit mollement dans sa forme grâce à son élasticité, un liquide d’ambre s’est répandu, accompagné de rafraîchissement, de parfums suaves, certes, - mais souvent aussi de la conscience amère d’une expulsion prématurée de pépins.

 

Faut-il prendre parti entre ces deux manières de mal supporter l’oppression ? – L’éponge n’est que muscle et se remplit de vent, d’eau propre où d’eau sale selon : cette gymnastique est ignoble. L’orange a meilleur goût, mais elle est trop passive, - et ce sacrifice odorant…c’est faire à l’oppresseur trop bon compte vraiment.

 

Mais ce n’est pas assez avoir dit de l’orange que d’avoir rappelé sa façon particulière de parfumer l’air et de réjouir son bourreau. Il faut mettre l’accent sur la coloration glorieuse du liquide qui en résulte, et qui, mieux que le jus de citron, oblige le larynx à s’ouvrir largement pour la prononciation du mot comme pour l’ingestion du liquide, sans aucune moue appréhensive de l’avant - bouche dont il ne fait pas hérisser les papilles.

 

Et l’on demeure au reste sans paroles pour avouer l’admiration que mérite l’enveloppe du tendre, fragile et rose ballon ovale dans cet épais tampon – buvard humide dont l’épiderme extrêmement mince mais très pigmenté, acerbement sapide, est juste assez rugueux pour accrocher dignement la lumière sur la parfaite forme du fruit.

 

Mais à la fin d’une trop courte étude, menée aussi rondement que possible, - il faut en venir au pépin. Ce grain, de la forme d’un minuscule citron, offre à l’extérieur la couleur du bois blanc de citronnier, à l’intérieur un vert de pois ou de germe tendre. C’est en lui que se retrouvent, après l’explosion sensationnelle de la lanterne vénitienne de saveurs, couleurs et parfums que constitue le ballon fruité lui-même, - la dureté relative et la verdeur (non d’ailleurs entièrement insipide) du bois, de la branche, de la feuille : somme toute petite quoique avec certitude la raison d’être du fruit.

 

Les mûres


Aux buissons typographiques constitués par le poème sur une route qui ne mène hors des choses ni à l’esprit, certains fruits sont formés d’une agglomération de sphères qu’une goutte d’encre remplit.

  

Noirs, roses et kakis ensemble sur la grappe, ils offrent plutôt le spectacle d’une famille rogue à ses âges divers, qu’une tentation très vive à la cueillette.

Vue la disproportion des pépins à la pulpe les oiseaux les apprécient peu, si peu de chose au fond leur reste quand du bec à l’anus ils en sont traversés.

 

Mais le poète au cours de sa promenade professionnelle, en prend de la graine à raison :

« Ainsi donc, se dit-il, réussissent en grand nombre les efforts patients d’une fleur très fragile quoique par un rébarbatif enchevêtrement de ronces défendue. Sans beaucoup d’autres qualités, - mûres, parfaitement elles sont mûres – comme aussi ce poème est fait. »

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6 novembre 2009 5 06 /11 /novembre /2009 13:57
L'Ile des lézards est le tome 5 de la série des Chevaliers d'Emeraude dont les tomes 1, 2 et 7 sont présentés sur ce blog par Pierre P dans ces articles :

Robillard A, Les chevaliers d'Emeraude, Le feu dans le ciel

Robillard A, Les chevaliers d'Emeraude, Les dragons de l'Empereur noir

Robillard Anne, Les chevaliers d'Emeraude, L'enlèvement


Dans ce tome 5, les chevaliers doivent défendre le continent d'Enkidev contre les soldats insectes de l'Empire Noir mais ils sont attaqués par des hommes-lézards qui enlèvent les femmes humaines.
Les chevaliers partent alors sur l'île des lézards pour récupérer les femmes et sauver les femmes-lézards puis ils rentrent aux château pour célébrer leur victoire.

Livre disponible au CDI, cote
R ROB
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30 octobre 2009 5 30 /10 /octobre /2009 17:58
Jadis et Naguère

Art poétique




De la musique avant toute chose,

Et pour cela préfère l'Impair

Plus vague et plus soluble dans l'air,

Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

[...]


Fêtes galantes

Colloque sentimental

 


Dans le vieux parc solitaire et glacé,
Deux formes ont tout à l’heure passé.

Leurs yeux sont morts et leurs lèvres sont molles,

Et l’on entend à peine leurs paroles.

Dans le vieux parc solitaire et glacé,

Deux spectres ont évoqué le passé.

- Te souvient-il de notre extase ancienne ?
- Pourquoi voulez-vous donc qu’il m’en souvienne ?

- Ton coeur bat-il toujours à mon seul nom ?
Toujours vois-tu mon âme en rêve ? - Non.

- Ah ! les beaux jours de bonheur indicible
Où nous joignions nos bouches ! - C’est possible.


- Qu’il était bleu, le ciel, et grand, l’espoir !

- L’espoir a fui, vaincu, vers le ciel noir.

Tels ils marchaient dans les avoines folles,
Et la nuit seule entendit leurs paroles.






Poèmes Saturniens

Melancholia

Mon rêve familier





Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,
Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon coeur transparent
Pour elle seule, hélas! cesse d'être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse? Je l'ignore.
Son nom? Je me souviens qu'il est doux et sonore,
Comme ceux des aimés que la vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L'inflexion des voix chères qui se sont tues.

 

Romances sans paroles

Ariettes oubliées

Il pleure dans mon coeur...



Il pleure dans mon coeur
Comme il pleut sur la ville;

Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon coeur?

O bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits!
Pour un coeur qui s'ennuie

O le chant de la pluie!

Il pleure sans raison
Dans ce coeur qui s'écoeure.

Quoi! Nulle trahison?...
Ce deuil est sans raison.

C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon coeur a tant de peine!

 


Toute la poésie de Verlaine en ligne ici.
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23 octobre 2009 5 23 /10 /octobre /2009 13:56
Abécédaire proposé par Emilie et Sami de 4e F

Publication d'Emilie en attente

Publication de Sami :

M comme Mintz, la famille victime de M. N
N comme Noël, la période où se déroule l'histoire ou comme "Monsieur N" qui "n’avait pas été un criminel toute sa vie. La preuve il avait déjà neuf ans quand il tua pour la première fois. Bien entendu, à cette époque, il n’était pas encore monsieur N… Il était Léo, petit garçon qui passait ses étés chez Mémé et Pépé. » annonce la première phrase du roman.
O comme oublier et comme Odette qui a peur que le Père Noël les oublie mais  M. N ne les oublie pas, lui.
P comme Patel les voisins de Mintz  et comme physique car "à 13 ans il attrapa ce physique anodin très envié des cancres"
Q comme un quelconque citoyen
R comme rose comme "sa bouche rose dans son masque de laitue"
S comme sourit : Bébé Lou sourit.
Thor, le chien que M N a déjà tué
Z comme zèle car "elle dépensait tout son zèle à faire le croquemitaine"




Ce livre est disponible au CDI Cote RFER. La notice indique :

Résumé : Monsieur N. déteste les faibles, les étrangers et les Juifs. Un soir, il découvre dans sa boîte aux lettres une missive anonyme disant : "vous êtes coupable, nous possédons la preuve". Il est persuadé que quelqu'un l'a vu tuer son chien Thor et brûler le vieux Rémi, le clochard du coin...

Note de contenu : Un très bon roman où l'intensité croît au fil des pages, où l'humour a aussi sa place.

Genre : roman

Thème de fiction : suspense/racisme/peur/angoisse


Et découvrez ici deux inteviews de Malika Ferdjoukh par des collègiens.
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23 octobre 2009 5 23 /10 /octobre /2009 13:03

L'incipit a été étudié en classe.

Mégane, Pierre-Louis, Edern et Corentin présentent des personnages :

Andréas est un collégien de troisième comme ses amis Thierry et Eric, il a 17 ans. C'est une grosse brute vulgaire et sadique et il a le crâne rasé. Il aime voir souffrir les autres et les jeux vidéos violents et sanglants. Andréas a un ordinateur avancé comme ses deux camarades.

Eric a 15 ans, c'est un amateur de jeux vidéos, il a un frère militaire et un peu vulgaire car il parle familièrement et dit "arrêtez vos conneries ".

Thierry, a le même âge qu'Eric, il paraît le plus intelligent des trois car il a mémorisé l'adresse de la boutique. Il est le souffre douleur d'Andréas, il aime les jeux vidéos et il est ami avec Eric et l'était avec Andréas au début.

Cet abécédaire a été construit par Louis-Marie, Méven et Pierre C

A- Andréas est un des personnages principaux
B- Boisdeffre, nom de famille d'un des personnages principaux
C- "Con", une des insultes dites par Andréas
D- Doom, jeu préféré d'Andréas

E- Eric , un des trois personnages principaux
F- Frenzy, le magasin de jeux videos se nomme Games Frenzy
G- Games Frenzy se trouve à Londres,
125, Upper Tollington Court Road
H- Homme croisé dans le magasin de jeu
I- Immobilisant , les héros s'immobilent dans la station de métro en voyant l'affichette.
J-Jeu, le passe-temps des personnages
K-Kidnappé, hypothèse du frère d'Eric

L-Libératrice Jeu vidéo
M-Médiévale Temps des chevaliers
N- Niveau de difficulté d'un jeu
O-Ordinateur, Console de jeu utilisé par les personnages
P- Programme d'installation d'un jeu
Q- Quake II eut trouvé dans le magasin
R- Rôle, Jeu de rôles.
S- Sombre, une avenue sombre
T- Thierry, un des personnages principaux
U- USA, porovennce des jeux d'importation
V- Verdun, ville où va se passer le jeu
W- Westminster, ville anglaise
X- XII douze
Y- Yeux Partie du visage
Z- Zombie Monstres de Doom




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23 octobre 2009 5 23 /10 /octobre /2009 12:33
Abécédaire réalisé par Adrian , Maï-Lin , Alexandre  et Cathy de 4e F

A : Annette , Annette est la soeur de Ludovic
B : Bernard , le nom de famille de Ludovic
C : Claire , prénom de l'auteur
D : Darru , le vieil homme du village
E : Enfant , Frédéric est un enfant , il a 12 ans.
F : Fugue , Frédéric fait une fugue
G : Gilles , Gilles est l'ami de Frédéric
H :
I : Illustration, l'illustratrice est Anades Modigliani
J : Julliard . nom de l'auteur
K : Kévin . Kévin est un garcon de l'école de Ludovic
L : Ludovic, fils de M. et Mme  Bernard . Bon élève. Il ressemble à Frédéric.
M : Mauvaises . Frédéric a des mauvaises notes.
N : Notes , A la fin , Frédéric a des bonnes notes
O : Ouragan , Ouragan est un cheval
P : Paul , Il est le frère de Ludovic Bernard.
Q :
R : Rêve .Frédéric rêve d'aller à la campagne .
S : Soir . C'est un soir de décembre que Frédéric fait une fugue.
T : Train , Frédéric prend le train pour aller en campagne .
U :
V : Vigne : l'endroit où va Frédéric
W :
X :
Y : Yeux : les yeux d' Annette font couler des larmes de bonheur quand elle croit retrouver son frère.
Z :

L'incipit a été étudié en classe.

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11 octobre 2009 7 11 /10 /octobre /2009 18:21
Le bateau ivre






Comme je descendais des Fleuves impassibles,
Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
Des Peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles,
Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs.

J'étais insoucieux de tous les équipages,

Porteur de blés flamands ou de cotons anglais.
Quand avec mes haleurs ont fini ces tapages,
Les Fleuves m'ont laissé descendre où je voulais.

Dans les clapotements furieux des marées,
Moi, l'autre hiver, plus sourd que les cerveaux d'enfants,
Je courus ! Et les Péninsules démarrées
N'ont pas subi tohu-bohus plus triomphants.

La tempête a béni mes éveils maritimes.
Plus léger qu'un bouchon j'ai dansé sur les flots
Qu'on appelle rouleurs éternels de victimes,
Dix nuits, sans regretter l'oeil niais des falots !

Plus douce qu'aux enfants la chair des pommes sûres,
L'eau verte pénétra ma coque de sapin
Et des taches de vins bleus et des vomissures
Me lava, dispersant gouvernail et grappin.

Et dès lors, je me suis baigné dans le Poème
De la Mer, infusé d'astres, et lactescent,
Dévorant les azurs verts ; où, flottaison blême
Et ravie, un noyé pensif parfois descend ;

Où, teignant tout à coup les bleuités, délires
Et rhythmes lents sous les rutilements du jour,
Plus fortes que l'alcool, plus vastes que nos lyres,
Fermentent les rousseurs amères de l'amour !

Je sais les cieux crevant en éclairs, et les trombes
Et les ressacs et les courants : je sais le soir,
L'Aube exaltée ainsi qu'un peuple de colombes,
Et j'ai vu quelquefois ce que l'homme a cru voir !

J'ai vu le soleil bas, taché d'horreurs mystiques,
Illuminant de longs figements violets,
Pareils à des acteurs de drames très antiques
Les flots roulant au loin leurs frissons de volets !

J'ai rêvé la nuit verte aux neiges éblouies,
Baiser montant aux yeux des mers avec lenteurs,
La circulation des sèves inouïes,
Et l'éveil jaune et bleu des phosphores chanteurs !

J'ai suivi, des mois pleins, pareille aux vacheries
Hystériques, la houle à l'assaut des récifs,
Sans songer que les pieds lumineux des Maries
Pussent forcer le mufle aux Océans poussifs !

J'ai heurté, savez-vous, d'incroyables Florides
Mêlant aux fleurs des yeux de panthères à peaux
D'hommes ! Des arcs-en-ciel tendus comme des brides
Sous l'horizon des mers, à de glauques troupeaux !

J'ai vu fermenter les marais énormes, nasses
Où pourrit dans les joncs tout un Léviathan !
Des écroulements d'eaux au milieu des bonaces,
Et les lointains vers les gouffres cataractant !

Glaciers, soleils d'argent, flots nacreux, cieux de braises !
Échouages hideux au fond des golfes bruns
Où les serpents géants dévorés des punaises
Choient, des arbres tordus, avec de noirs parfums !

J'aurais voulu montrer aux enfants ces dorades
Du flot bleu, ces poissons d'or, ces poissons chantants.
- Des écumes de fleurs ont bercé mes dérades
Et d'ineffables vents m'ont ailé par instants.

Parfois, martyr lassé des pôles et des zones,
La mer dont le sanglot faisait mon roulis doux
Montait vers moi ses fleurs d'ombre aux ventouses jaunes
Et je restais, ainsi qu'une femme à genoux...

Presque île, ballottant sur mes bords les querelles
Et les fientes d'oiseaux clabaudeurs aux yeux blonds.
Et je voguais, lorsqu'à travers mes liens frêles
Des noyés descendaient dormir, à reculons !

Or moi, bateau perdu sous les cheveux des anses,
Jeté par l'ouragan dans l'éther sans oiseau,
Moi dont les Monitors et les voiliers des Hanses
N'auraient pas repêché la carcasse ivre d'eau ;

Libre, fumant, monté de brumes violettes,
Moi qui trouais le ciel rougeoyant comme un mur
Qui porte, confiture exquise aux bons poètes,
Des lichens de soleil et des morves d'azur ;

Qui courais, taché de lunules électriques,
Planche folle, escorté des hippocampes noirs,
Quand les juillets faisaient crouler à coups de triques
Les cieux ultramarins aux ardents entonnoirs ;

Moi qui tremblais, sentant geindre à cinquante lieues
Le rut des Béhémots et les Maelstroms épais,
Fileur éternel des immobilités bleues,
Je regrette l'Europe aux anciens parapets !

J'ai vu des archipels sidéraux ! et des îles
Dont les cieux délirants sont ouverts au vogueur :
- Est-ce en ces nuits sans fonds que tu dors et t'exiles,
Million d'oiseaux d'or, ô future Vigueur ?

Mais, vrai, j'ai trop pleuré ! Les Aubes sont navrantes.
Toute lune est atroce et tout soleil amer :
L'âcre amour m'a gonflé de torpeurs enivrantes.
Ô que ma quille éclate ! Ô que j'aille à la mer !

Si je désire une eau d'Europe, c'est la flache
Noire et froide où vers le crépuscule embaumé
Un enfant accroupi plein de tristesse, lâche
Un bateau frêle comme un papillon de mai.

Je ne puis plus, baigné de vos langueurs, ô lames,
Enlever leur sillage aux porteurs de cotons,
Ni traverser l'orgueil des drapeaux et des flammes,
Ni nager sous les yeux horribles des pontons.









Ophélie

Dans le cadre du Printemps des poètes, Télérama a produit cet enregistrement d'Ophélie un poème publié dans le recueil Une saison en enfer et inspiré de l'histoire de la fiancée d'Hamlet dans la pièce de Shakespeare que le peintre Millet a aussi représentée :


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8 août 2009 6 08 /08 /août /2009 19:25
Je viens de terminer la lecture de ce roman de 1010 pages, publié en 1968, année où Cohen s'est vu attribuer le grand prix du roman de l'Académie française. Je ne vais pas m'aventurer à résumer une telle oeuvre, d'autres l'ont déjà fait de façon très détaillée sur Wikipedia ou plus analytique dans L'Encyclopédie Universalis.
Pour présenter ce roman somme que je quitte à regret et qui me hantera sûrement encore longtemps, je retiendrais surtout des chocs, des luttes permanentes entre
tragédie et comédie
amour et haine
nature et culture
beauté et laideur
passion et vie
vie sociale et isolement
Juifs et chrétiens
hommes et femmes
richesse et pauvreté
réussite et échec
ennui et vie....

Une belle leçon sur la vie, étourdissante et inoubliable comme la valse qui entraînait Solal et Ariane, grave, désespérée aussi. C'est un livre à lire absolument mais mieux vaut attendre d'être un peu armé par la vie. Je le conseille plutôt aux adultes.

La valse de Camille Claudel me paraît être une bonne illustration. La voici, photographiée lors d'une expo en 2005 à Dinan :



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17 juillet 2009 5 17 /07 /juillet /2009 22:26
Andreï Makine est l'auteur de l'inoubliable Testament français, roman qui lui avait valu le prix Goncourt, le prix Goncourt des lycéens et le prix Médicis en 1995 et, si je ne m'abuse, la naturalisation française qu'il tentait vainement d'obtenir (est-ce une légende?). Andrei Makine en effet est d'origine russe, il a vécu 30 ans en Russie mais titulaire d'un doctorat de littérature obtenu à la Sorbonne, il maîtrise parfaitement notre langue dans laquelle il a écrit le Testament français comme La vie d'un homme inconnu.

Etrange titre pour ce roman, un paradoxe dirait-on. Il faut attendre les toutes dernières pages, l'explication des énigmatiques F.I et H.I pour comprendre de quel "homme inconnu" l'auteur écrit la vie. Au début, il semble bien que le  héros soit le narrateur, Choutov (le clown, le bouffon en russe), un écrivain russe confronté au manque de reconnaissance de la littérature dans le Paris actuel. Certes, il " fait une télé", une fois, très tard et son amie Léa est fière de lui mais il voit bien que tout est faux, que les français ont la nostalgie des images des grands romans russes, de Saint-Pétersbourg (Là, je me sens visée !) mais qu'ils ne s'intéressent plus à la littérature. Quand sa (trop) jeune amie le quitte, Choutov s'envole vers son pays décidé à se ressourcer auprès de  son pays et peut-être, auprès de son premier amour.
Son pays, oui mais lequel ? L'Union Soviétique qu'il avait quittée nest plus: on s'y active, on construit, on consomme, on fait la fête... à tout prix ! Choutov est un peu perdu dans cette nouvelle Saint-Pétersbourg. Son amour de jeunesse le reçoit mais n'a pas de temps pour lui, trente ans ont passé, elle est devenue une femme d'affaires très reconnue et hyper active.
C'est dans l'appartement en pleine restructuration de celle-ci que Choutov engage une longue conversation avec un vieil homme sur le point d'être évacué des lieux. Ce vieil homme, c'est   Volski. Avec lui s'amorce un tournant du livre qui devient alors littéralement poignant. ... Raconter serait trop réduire, l'écriture est splendide, le récit passionnant, du grand MAKINE, à ne surtout pas manquer.

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16 juillet 2009 4 16 /07 /juillet /2009 15:24
Philippe Grimbert est le célèbre auteur d'Un Secret, présenté ici par Céline, il est aussi psychanalyste et ce roman publié chez Grasset en porte clairement la marque. Dédié "à mes fantômes" par Grimbert, c'est un roman à la première personne où le narrateur, Loup, raconte sa propre existence en partant non pas de sa naissance mais de sa rencontre au jardin public du petit Mando qui devient à partir de ce jour-là son meilleur ami. Or le récit s'attache de façon insistante aux petites lâchetés du narrateur, à ses infidélités, à ses ambiguës  accointances avec la mort des autres ou à ses trahisons et l'on peine à en saisir la raison. Au fil du temps, les intérêts de Loup (pour la psychanalyse) et de Mando divergent, ils se voient moins jusqu'au jour où Loup reçoit un appel désespéré de Mando. Il le retrouve transformé, devenu fantôme de lui même, au bord du suicide. Loup retarde le geste fatal par un long face à face où il apprend que déjà dans leur enfance, Mando avait fait une crise lorsque Loup lui avait fait faux bond pour aller en colonie de vacances mais ce face à face ne constitue qu'une suspension provisoire d'un acte décisif qui livre le narrateur aux remords et aux interrogations sans réponses.
Ce texte est le roman d'une amitié _et c'est en effet un roman que je souhaitais lire_ mais plus encore, _le psychanalyste a pris la pas sur le romancier_ il m'apparaît comme la quête d'un  apaisement  improbable. Les vers de "La Servante au grand coeur" de Baudelaire, placés en exergue l'annonçaient d'ailleurs :

Et quand octobre souffle, émondeur des vieux arbres,
Son vent mélancolique à l'entour de leurs marbres,
Certes, ils doivent trouver les vivants bien ingrats,
A dormir, comme ils font, chaudement dans leurs draps,

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