Voilà un livre que je quitte à regret, surprise à la dernière page, de le voir fini !, c'est qu'il n'a pas réellement de début ni de fin ! l'auteur nous raconte une tranche de vie, de sa vie et de celle de son frère ! certes, le récit commence par une naissance, celle d'un veau, lorsque l'auteur avait 15 ans alors que son frère avait "à peine treize ans" mais c'est qu'il y a là, un moment crucial : "Mon frère n’était pas aussi confiant. Je sentais la présence en lui d’une menace, d’un traumatisme naissant. L’adolescence est une période de remodelage du cerveau : le programme de maturation qui bientôt fournira les codes de l’âge adulte fait l’objet d’importants bouleversements. De nouvelles connexions neuronales se mettent en place, tandis que d’autres s’évanouissent. Des accidents se produisent, paraît-il, lors de cette grande période de reconfiguration, qui rendent certaines jeunes personnes particulièrement fragiles inaptes à gérer les situations émotionnellement éprouvantes. Cette nuit-là en tout cas, dans sa petite chambre jouxtant la mienne dans la maison familiale, j’ai entendu mon frère sangloter au creux de son lit. Le lendemain, les premiers signes de sa vertigineuse descente se manifestaient".
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Cet événement constitue le premier chapitre du récit qui pour l'essentiel se déroule quarante-cinq ans plus tard. Tout comme le titre et tout comme l'image de couverture, il met au premier plan ce qui fait la singularité du frère cadet de l'auteur : il est schizophrène. Une large partie de ce récit biographique est alors consacrée aux relations qui unissent l'auteur et son frère : "Le mot schizophrénie, formé à partir du grec skhizein (fendre) et phrên (esprit), ne pourrait mieux illustrer le coup de hache qui un jour a fait voler en éclats l’existence de mon frère, et ouvert en lui une brèche impossible à refermer. Je tente comme je peux de me glisser avec lui dans cette ouverture, mais n’y parviens jamais qu’à moitié."
L'auteur, lui-même, laisse à plusieurs son esprit ou son âme (c'est le terme qu'il emploie" s'éloigner du simple réel pour accéder aux intuitions, de telle sorte que lors d'une crise de paranoïa très violente de son frère, l'auteur voit un roitelet monter au ciel en emportant son âme ou que lors d'une promenade dans la campagne, il marche avec son père, pourtant décédé.
Mais ce qui marque surtout dans ce roman, c'est la sérénité que l'auteur trouve avec son frère, avec son épouse, Livia, mais aussi avec ses voisins, avec les animaux, son chien Pablo et son chat Lennon, avec la nature ! Sa vie consiste pour l'essentiel à écrire, à jardiner, à parler avec son frère de jardinage ou de poésie et à l'aider, à se promener dans la campagne et à ne rien faire. Et ce récit qui ne raconte finalement pas grand-chose est extrêmement apaisant.
Extrait choisi : « La vie passe, m’a dit ce matin mon frère une fois achevée sa lecture de mon manuscrit. La vie passe, banale, insignifiante, et pèse pourtant à ce point sur la pensée, le caractère et l’âme qu’elle finit par leur donner une raison d’être. Oui, presque rien n’arrive dans cette histoire, mais tout y a un sens. »